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Scène V.

TITE, DOMITIAN, BÉRÉNICE, DOMITIE, FLAVIAN, ALBIN, PHILON, PLAUTINE.
TITE.

Ô dieux ! est-ce, Madame, aux reines de surprendre ?
620Quel accueil, quels honneurs peuvent-elles attendre,
Quand leur surprise envie au souverain pouvoir
Celui de donner ordre à les bien recevoir ?

BÉRÉNICE.

Pardonnez-le, Seigneur, à mon impatience.
J’ai fait sous d’autres noms demander audience :
625Vous la donniez trop tard à mes ambassadeurs ;
Je n’ai pu tant attendre à voir tant de grandeurs ;
Et quoique par vous-même autrefois exilée,
Sans ordre et sans aveu je me suis rappelée,
Pour être la première à mettre à vos genoux
630Le sceptre qu’à présent je ne tiens que de vous,
Et prendre sur les rois cet illustre avantage
De leur donner l’exemple à vous en faire hommage.
Je ne vous dirai point avec quelles langueurs
D’un si cruel exil j’ai souffert les longueurs :
Vous savez trop…

TITE.

635Vous savez trop…Je sais votre zèle, et l’admire,
Madame ; et pour me voir possesseur de l’empire,
Pour me rendre vos soins, je ne méritois pas
Que rien vous pût résoudre à quitter vos États,
Qu’une si grande reine en formât la pensée.
640Un voyage si long vous doit avoir lassée.
Conduisez-la, mon frère, en son appartement[1].

  1. Voltaire (1764) fait suivre ce vers de l’indication : à Flavian et Albin.