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Je vous dirois, Seigneur, quelle en est la puissance,
Si vous ne le saviez par votre expérience.
Ne rompez[1] pas des nœuds et si forts et si doux :
Rien ne les peut briser que le trépas, ou vous ;
555Et c’est un triste honneur pour une si grande âme,
Que d’accabler un frère et contraindre une femme.

TITE.

Je ne contrains personne ; et de sa propre voix
Nous allons, vous et moi, savoir quel est son choix.


Scène III.

TITE, DOMITIAN, DOMITIE, ALBIN, PLAUTINE.
TITE.

Parlez, parlez, Madame, et daignez nous apprendre
560Où porte votre cœur, ce qu’il sent de plus tendre,
Qui le possède entier de mon frère ou de moi ?

DOMITIE.

En doutez-vous, Seigneur, quand vous avez ma foi ?

TITE.

J’aime à n’en point douter, mais on veut que j’en doute :
On dit que cette foi ne vous donne pas toute,
565Que ce cœur reste ailleurs. Parlez en liberté,
Et n’en consultez point cette noble fierté,
Ce digne orgueil du sang que mon rang sollicite :
De tout ce que je suis ne regardez que Tite ;
Et pour mieux écouter vos désirs les plus doux,
570Entre le prince et moi ne regardez que vous.

DOMITIE.

Qu’avez-vous dit de moi, prince ?

  1. L’édition de 1692 donne trompez, pour rompez, ce qui ne peut être qu’une faute d’impression.