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ALBIN.

Seigneur, quelle mesure avez-vous à garder ?
Quand on voit tout perdu, craint-on de hasarder ?
335Et si l’ambition vers un autre l’entraîne,
Que vous peut importer son amour ou sa haine ?

DOMITIAN.

Qu’un salutaire avis fait une douce loi
À qui peut avoir l’âme aussi libre que toi !
Mais celle d’un amant n’est pas comme une autre âme :
340Il ne voit, il n’entend, il ne croit que sa flamme ;
Du plus puissant remède il se fait un poison,
Et la raison pour lui n’est pas toujours raison.

ALBIN.

Et si je vous disois que déjà Bérénice
Est dans Rome, inconnue, et par mon artifice ?
345Qu’elle surprendra Tite, et qu’elle y vient exprès
Pour de ce grand hymen renverser les apprêts ?

DOMITIAN.

Albin, seroit-il vrai ?

ALBIN.

Albin, seroit-il vrai ?La nouvelle vous flatte :
Peut-être est-elle fausse ; attendez qu’elle éclate ;
Surtout à l’Empereur déguisez-la si bien…

DOMITIAN.

350Va : je lui parlerai comme n’en sachant rien.

FIN DU PREMIER ACTE.