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se tenir au pays d’Histoire, dont ils sont originaires, que d’avoir voulu passer dans l’empire de Poésie, à quoi ils n’étoient nullement propres, et où, pour dire la vérité, on les a amenés, à ce qu’il me semble, assez mal à propos[1]. »

L’édition originale de la pièce de notre poëte a pour titre : Tite et Berenice. Comedie héroïque. Par P. Corneille. À Paris, chez Loüis Billaine, au Palais… M.DC.LXXI, auec priuilege du Roy… Le volume, de format in-12, se compose de 4 feuillets et de 44 pages. L’Achevé d’imprimer pour la première fois est du 3e de février 1671. Le privilège, accordé à Corneille, mentionne la « traduction en vers françois de la Thébaïde de Stace, » aujourd’hui perdue, dont nous avons déjà parlé[2] et sur laquelle nous aurons à revenir ; il porte la date du « dernier jour de decembre, l’an de grâce mil six cens soixante-dix. » Une note qui le termine porte que « ledit sieur Corneille a cedé son droit de Privilege à Thomas Jolly, Guillaume de Luyne, et Louis Billaine, pour la Comedie de Tite et Bérénice seulement. »

Contre son habitude, Corneille n’a placé en tête de cette pièce aucun avis au lecteur, mais seulement deux extraits de Xiphilin, l’abréviateur de Dion Cassius. Il ne cite pas ce célèbre passage de Suétone que Racine rapporte en l’abrégeant au commencement de sa préface : « Titus, reginam Berenicen, cui etiam nuptias pollicitus ferebatur… statim ab Urbe dimisit invi-

  1. Recueil de Granet, tome II, p. 311 et 312. — L’histoire en effet nous montre Bérénice, fille d’Agrippa, roi de Judée, née l’an 28 de Jésus-Christ, comme une femme corrompue, qui, après avoir épousé d’abord son oncle Hérode, roi de Chalcis, puis Polémon, roi de Cilicie, lequel s’était fait juif pour elle, fut répudiée par lui, à cause des débordements auxquels elle se livrait. Titus, parvenu à l’empire à trente-neuf ans, jugea indispensable de s’en séparer ; elle était alors âgée de cinquante et un ans. Il y a loin de là à l’héroïne de Corneille et de Racine. On a prétendu il est vrai que la Bérénice de Titus était une nièce de celle dont nous venons de parler, mais cette interprétation ne s’est pas accréditée. Voyez le Dictionnaire historique de Bayle au nom de Bérénice, et la Dissertation sur Bérénice, par M. Rey, dans les Mémoires de la Société des antiquaires de France, nouvelle série, tome I, p. 235 et suivantes.
  2. Voyez l’Avertissement, tome I, p. xiii et xiv.