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ACTE V, SCÈNE V.

Venge toute la terre, ou grossis l’hécatombe.
Si ta gloire[1] sur toi, si l’amour ne peut rien,
Meurs en traître, et du moins sers de victime au mien.
Mais qui me rend, Seigneur, le bien de votre vue[2] ?1725


Scène VI.

VALAMIR, HONORIE, OCTAR.
VALAMIR.

L’impatient transport d’une joie imprévue :
Notre tyran n’est plus.

HONORIE.

Notre tyran n’est plus.Il est mort ?

VALAMIR.

Notre tyran n’est plus.Il est mort ?Écoutez
Comme enfin l’ont puni ses propres cruautés,
Et comme heureusement le ciel vient de souscrire
À ce que nos malheurs vous ont fait lui prédire[3]1730
À peine sortions-nous, pleins de trouble et d’horreur,
Qu’Attila recommence à saigner de fureur,
Mais avec abondance ; et le sang qui bouillonne
Forme un si gros torrent, que lui-même il s’étonne.
Tout surpris qu’il en est : « S’il ne veut s’arrêter,1735
Dit-il, on me paiera ce qu’il m’en va coûter. »
Il demeure à ces mots sans parole, sans force ;
Tous ses sens d’avec lui font un soudain divorce :
Sa gorge enfle, et du sang dont le cours s’épaissit
Le passage se ferme, ou du moins s’étrécit[4].1740

  1. Voltaire a changé « ta gloire » en « la gloire. »
  2. Dans l’édition de Voltaire (1764), ce vers, précédé des mots : honorie, à Valamir, commence la scène vi.
  3. Voyez ci-dessus, p. 174, vers 1599-1604.
  4. Ce sont les mots déjà cités de Jornandès (de Getarum rebus gestis, chapitre