Comme il faut dédaigner le plus grand des humains ;
Dites-moi quels mépris peuvent le satisfaire.
Ah ! si je lui déplais à force de lui plaire,
Si de son trop d’amour sa haine est tout le fruit,
Alors qu’on la mérite, où se voit-on réduit ?
Allez, Seigneur, allez où tant d’orgueil aspire.
Honorie a pour dot la moitié de l’empire ;
D’un mérite penchant c’est un ferme soutien ;
Et cet heureux éclat efface tout le mien :
Je n’ai que ma personne.
Plus qu’un droit souverain sur tout ce qui respire.
Tout ce qu’a cet empire ou de grand ou de doux,
Je veux mettre ma gloire à le tenir de vous.
Faites-moi l’accepter, et pour reconnoissance
Quels climats voulez-vous sous votre obéissance ?
Si la Gaule vous plaît, vous la partagerez :
J’en offre la conquête à vos yeux adorés ;
Et mon amour…
La main du conquérant vaut mieux que sa conquête,
Quoi ? vous pourriez m’aimer, Madame, à votre tour ?
Qui sème tant d’horreurs fait naître peu d’amour.
Qu’aimeriez-vous en moi ? Je suis cruel, barbare ;
Je n’ai que ma fierté, que ma fureur de rare :
On me craint, on me hait ; on me nomme en tout lieu
La terreur des mortels et le fléau de Dieu[1].
Aux refus que je veux c’est là trop de matière ;
Et si ce n’est assez d’y joindre la prière,
- ↑ Voyez ci-dessus, p. 103, note 4.