Et je vous rends, seigneur, mille grâces pour elle,
À vous, à ce grand cœur dont la compassion
Daigne ici l’honorer de sa protection.
Sertorius
Protéger hautement les vertus malheureuses,
C’est le moindre devoir des âmes généreuses :
Aussi fais-je encore plus, je lui donne un époux.
Pompée
Un époux ! Dieux ! Qu’entends-je ? Et qui, Seigneur ?
Sertorius
Moi.
Pompée
Vous !
Seigneur, toute son âme est à moi dès l’enfance :
N’imitez point Sylla par cette violence ;
Mes maux sont assez grands, sans y joindre celui
De voir tout ce que j’aime entre les bras d’autrui.
Sertorius
Tout est encore à vous. Venez, venez, Madame,
Faire voir quel pouvoir j’usurpe sur vôtre âme,
Et montrer, s’il se peut, à tout le genre humain
La force qu’on vous fait pour me donner la main.
Pompée
C’est elle-même, ô ciel !
Sertorius
Je vous laisse avec elle,
Et sais que tout son cœur vous est encor fidèle.
Reprenez votre bien, ou ne vous plaignez plus
Si j’ose m’enrichir, Seigneur, de vos refus.
Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 6.djvu/418
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