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ACTE 2




Scène 1


Viriate, Thamire


Viriate

Thamire, il faut parler, l’occasion nous presse,
Rome jusqu’en ces murs m’envoie une maîtresse,
Et l’exil d’Aristie enveloppé d’ennuis
Est prêt à l’emporter sur tout ce que je suis.
En vain de mes regards l’ingénieux langage,
Pour découvrir mon cœur, a tout mis en usage,
En vain par le mépris des vœux de tous nos Rois
J’ai cru faire éclater l’orgueil d’un autre choix ;
Le seul pour qui je tâche à le rendre visible,
Ou n’ose en rien connaître, ou demeure insensible,
Et laisse à ma pudeur des sentiments confus,
Que l’amour-propre obstine à douter du refus.
Épargne-m’en la honte, et prends soins de lui dire,
À ce héros si cher… Tu le connais, Thamire,
Car d’où pourrait mon Trône attendre un ferme appui,
Et pour qui mépriser nos Rois, que pour lui ?
Sertorius lui seul digne de Viriate
Mérite que pour lui tout mon amour éclate.
Fais-lui, fais-lui savoir le glorieux dessein
De m’affermir au Trône, en lui donnant la main,
Dis-lui… Mais j’aurais tort d’instruire ton adresse,
Moi qui connais ton zèle à servir ta Princesse.