Rendit après sa mort sa haine triomphante :
Quand nous croyions le sceptre en la nôtre affermi,
Nous changeâmes de sort en changeant d’ennemi ;
Et le voyant régner où régnoient les deux frères,
Jugez à qui je puis imputer nos misères.
Excusez un amour que vos yeux ont éteint :
Son cœur pour Édüige en était lors atteint ;
Et pour gagner la sœur à ses désirs trop chère,
Il fallut épouser les passions du frère.
Il arma ses sujets, plus pour la conquérir
Qu’à dessein de vous nuire ou de le secourir.
Alors qu’il arriva, Gundebert rendait l’âme,
Et sut en ce moment abuser de sa flamme.
« Bien, dit-il, que je touche à la fin de mes jours,
Vous n’avez pas en vain amené du secours ;
Ma mort vous va laisser ma sœur et ma querelle :
Si vous l’osez aimer, vous combattrez pour elle. »
Il la proclame reine ; et sans retardement
Les chefs et les soldats ayant prêté serment,
Il en prend d’elle un autre, et de mon prince même :
« Pour montrer à tous deux à quel point je vous aime,
Je vous donne, dit-il, Grimoald pour époux,
Mais à condition qu’il soit digne de vous ;
Et vous ne croirez point, ma sœur, qu’il vous mérite,
Qu’il n’ait vengé ma mort et détruit Pertharite,
Qu’il n’ait conquis Milan, qu’il n’y donne la loi.
À la main d’une reine il faut celle d’un roi. »
Voilà ce qu’il voulut, voilà ce qu’ils jurèrent,
Voilà sur quoi tous deux contre vous s’animèrent.
Non que souvent mon prince, impatient amant,
N’ait voulu prévenir l’effet de son serment ;
Mais contre son amour la princesse obstinée
A toujours opposé la parole donnée ;