Vous m’aimez, et j’en suis assez persuadée
Pour me donner à vous, s’il se donne à Médée ;
Mais si par jalousie ou par raison d’État,
Vous le laissez tous deux périr dans ce combat,
N’attendez rien de moi que ce qu’ose la rage
Quand elle est une fois maîtresse d’un courage,
Que les pleines fureurs d’un désespoir d’amour.
Vous me faites trembler, tremblez à votre tour :
Prenez soin de sa vie, ou perdez cette reine ;
Et si je crains sa mort, craignez aussi ma haine.
Scène II
Ah ! Madame, est-ce là cette fidélité
Que vous gardez aux droits de l’hospitalité ?
Quand pour vous je m’oppose aux destins de ma fille,
À l’espoir de mon fils, aux vœux de ma famille,
Quand je presse un héros de vous rendre sa foi,
Vous prêtez à son bras des charmes contre moi ;
De sa témérité vous vous faites complice
Pour renverser un trône où je vous fais justice :
Comme si c’étoit peu de posséder Jason,
Si pour don nuptial il n’avoit la toison ;
Et que sa foi vous fût indignement offerte,
À moins que son destin éclatât par ma perte !
Je ne sais pas, Seigneur, à quel point vous réduit
Cette témérité de l’ingrat qui me fuit ;
Mais je sais que mon cœur ne joint à son envie
Qu’un timide souhait en faveur de sa vie ;
Et que si je savois ce grand art de charmer,