Sitôt qu’il est banni, rentre par la pitié ;
Et que ce même feu, que je devrois éteindre,
M’oblige à vous haïr, et me force à vous plaindre.
Je ne t’empêche pas, volage, de changer ;
Mais du moins, en changeant, laisse-moi me venger.
C’est être trop cruel, c’est trop croître l’offense
Que m’ôter à la fois ton cœur et ma vengeance.
Le supplice où tu cours là va trop tôt finir.
Ce n’est pas me venger, ce n’est que te punir ;
Et toute sa rigueur n’a rien qui me soulage,
S’il n’est de mon souhait et le choix et l’ouvrage.
Hélas ! si tu pouvois le laisser à mon choix,
Ton supplice, il seroit de rentrer sous mes lois,
De m’attacher à toi d’une chaîne plus forte,
Et de prendre en ta main le sceptre que je porte.
Tu n’as qu’a dire un mot, ton crime est effacé :
J’ai déjà, si tu veux, oublié le passé.
Mais qu’inutilement je me montre si bonne
Quand tu cours à la mort de peur qu’on te pardonne !
Quoi ? tu ne réponds rien, et mes plaintes en l’air
N’ont rien d’assez puissant pour te faire parler ?
Que voulez-vous. Madame, ici que je vous die ?
Je ne connois que trop quelle est ma perfidie ;
Et l’état où je suis ne sauroit consentir
Que j’en fasse une excuse, ou montre un repentir :
Après ce que j’ai fait, après ce qui se passe,
Tout ce que je dirois auroit mauvaise grâce.
Laissez dans le silence un coupable obstiné,
Qui se plaît dans son crime, et n’en est point gêné.
Parle toutefois, parle, et non plus pour me plaire,
Mais pour rendre la force à ma juste colère ;
Parle, pour m’arracher ces tendres sentiments