Si j’avois eu sur vous un peu plus de croyance.
L’amour m’auroit livré ce précieux dépôt,
Et vous l’avez perdu pour le vouloir trop tôt.
L’amour vous est bien doux, et votre espoir tranquille,
Qui vous fit consumer deux ans chez Hypsipyle,
En consumeroit quatre avec plus de raison
À cajoler Médée et gagner la toison.
Après que nos exploits l’ont si bien méritée,
Un mot seul, un souhait dût l’avoir emportée ;
Mais puisqu’on la refuse au service rendu.
Il faut avoir de force un bien qui nous est dû.
De Médée en courroux dissipez donc les charmes ;
Combattez ce dragon, ces taureaux, ces gensdarmes[1].
Les Dieux nous ont sauvés de mille autres dangers,
Et sont les mêmes dieux en ces bords étrangers.
Pallas nous a conduits, et Junon de nos têtes
A parmi tant de mers écarté les tempêtes.
Ces grands secours unis auront leur plein effet,
Et ne laisseront point leur ouvrage imparfait.
Voyez si je m’abuse, amis, quand je l’espère :
Regardez de Junon briller la messagère ;
Iris nous vient du ciel dire ses volontés.
En attendant son ordre, adorons ses bontés.
Prends ton luth, cher Orphée, et montre à la Déesse
Combien ce doux espoir charme notre tristesse.
- ↑ Telle est l’orthographe du mot dans les anciennes éditions, y compris celle de 1692. Il est imprimé de même dans les Desseins et dans l’Examen ; voyez plus haut, p. 234 et p. 246.