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Scène III

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Jocaste.

Laissez-moi lui parler, et prêtez-nous silence.
Phorbas, envisagez ce prince en ma présence :
Le reconnaissez-vous ?


Phorbas.

Je crois vous avoir dit
Que je ne l’ai point vu depuis qu’on le perdit,
Madame : un si long temps laisse mal reconnaître
Un prince qui pour lors ne faisait que de naître ;
Et si je vois en lui l’effet de mon secours,
Je n’y puis voir les traits d’un enfant de deux jours.


Jocaste.

Je sais, ainsi que vous, que les traits de l’enfance
N’ont avec ceux d’un homme aucune ressemblance ;
Mais comme ce héros, s’il est sorti de moi,
Doit avoir de sa main versé le sang du roi,
Seize ans n’ont pas changé tellement son visage
Que vous n’en conserviez quelque imparfaite image.


Phorbas.

Hélas ! J’en garde encor si bien le souvenir,
Que je l’aurai présent durant tout l’avenir.
Si pour connaître un fils il vous faut cette marque,
Ce prince n’est point né de notre grand monarque.
Mais désabusez-vous, et sachez que sa mort
Ne fut jamais d’un fils le parricide effort.


Jocaste.

Et de qui donc, Phorbas ? Avez-vous connaissance