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Cependant vous laissez bien du trouble en ces lieux ;
Et si votre vertu pouvait croire mes larmes,
Vous nous épargneriez cent mortelles alarmes.


Dircé.

Dussent avec vos pleurs tous vos Thébains s’unir,
Ce que n’a pu l’amour, rien ne doit l’obtenir.



Scène III

.

Dircé.

À quel propos, seigneur, voulez-vous qu’on diffère,
Qu’on dédaigne un remède à tous si salutaire ?
Chaque instant que je vis vous enlève un sujet,
Et l’état s’affaiblit par l’affront qu’on me fait.
Cette ombre de pitié n’est qu’un comble d’envie :
Vous m’avez envié le bonheur de ma vie ;
Et je vous vois par là jaloux de tout mon sort,
Jusques à m’envier la gloire de ma mort.


Œdipe.

Qu’on perd de temps, madame, alors qu’on vous fait grâce !


Dircé.

Le ciel m’en a trop fait pour souffrir qu’on m’en fasse.


Jocaste.

Faut-il voir votre esprit obstinément aigri,
Quand ce qu’on fait pour vous doit l’avoir attendri ?


Dircé.

Faut-il voir son envie à mes vœux opposée,
Quand il ne s’agit plus d’Aemon ni de Thésée ?


Œdipe.

Il s’agit de répandre un sang si précieux,
Qu’il faut un second ordre et plus exprès des dieux.