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LE CID.
L’Infante.

Pense bien, ma Chimène, à ce que tu veux faire.
Adieu : tu pourras seule y penser à loisir[1].

Chimène.

Après mon père mort, je n’ai point à choisir.


Scène III.

DON FERNAND, DON DIÈGUE, DON ARIAS, DON RODRIGUE, DON SANCHE.
Don Fernand.

Généreux héritier d’une illustre famille,
1210Qui fut toujours la gloire et l’appui de Castille,
Race de tant d’aïeux en valeur signalés,
Que l’essai de la tienne a sitôt égalés,
Pour te récompenser ma force est trop petite ;
Et j’ai moins de pouvoir que tu n’as de mérite.
1215Le pays délivré d’un si rude ennemi,
Mon sceptre dans ma main par la tienne affermi,
Et les Mores défaits avant qu’en ces alarmes
J’eusse pu donner ordre à repousser leurs armes,
Ne sont point des exploits qui laissent à ton roi
1220Le moyen ni l’espoir de s’acquitter vers toi.
Mais deux rois tes captifs feront ta récompense[2].
Ils t’ont nommé tous deux leur Cid en ma présence :
Puisque Cid en leur langue est autant que seigneur[3],
Je ne t’envierai pas ce beau titre d’honneur.
1225Sois désormais le Cid : qu’à ce grand nom tout cède ;
Qu’il comble d’épouvante et Grenade et Tolède[4],

  1. Var. Adieu : tu pourras seule y songer à loisir. (1637-60)
  2. Var. Mais deux rois, tes captifs, seront ta récompense. (1637 in-12 et 44)
  3. Voyez le Lexique.
  4. Var. Qu’il devienne l’effroi de Grenade et Tolède. (1637-56)