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ACTE IV, SCÈNE VII. 501


Scène VII.

Clindor, en prison.

Aimables souvenirs de mes chères délices,
Qu’on va bientôt changer en d’infâmes supplices,
Que malgré les horreurs de ce mortel effroi,
Vos charmants entretiens ont de douceurs pour moi !
Ne m’abandonnez point, soyez-moi plus fidèles
Que les rigueurs du sort ne se montrent cruelles ;
Et lorsque du trépas les plus noires couleurs
Viendront à mon esprit figurer mes malheurs,
Figurez aussitôt à mon âme interdite
Combien je fus heureux par delà mon mérite.
Lorsque je me plaindrai de leur sévérité,
Redites-moi l’excès de ma témérité :
Que d’un si haut dessein ma fortune incapable
Rendoit ma flamme injuste, et mon espoir coupable ;
Que je fus criminel quand je devins amant,
Et que ma mort en est le juste châtiment.
x Quel bonheur m’accompagne à la fin de ma vie !
Isabelle, je meurs pour vous avoir servie ;
Et de quelque tranchant que je souffre les coups,
Je meurs trop glorieux, puisque je meurs pour vous.
Hélas ! que je me flatte, et que j’ai d’artifice
À me dissimuler la honte d’un supplice !
En est-il de plus grand que de quitter ces yeux
Dont le fatal amour me rend si glorieux ?
L’ombre d’un meurtrier creuse ici ma ruine :


1.Var. Il est en prison. (1663, en marge.)
2.Var. Vous avez de douceurs et de charmes pour moi ! (1639-57)
3.Var. Viendront en mon esprit figurer mes malheurs. (1648)
4.Var. Pour déguiser la honte et l’horreur d’un supplice !
Il faut mourir enfin, et quitter ces beaux yeux. (1639-57)
5.Var. L’ombre d’un meurtrier cause encor ma ruine. (1639-57)