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Scène III.

Créon, domestiques.


Créon.

Loin de me soulager vous croissez mes tourments ;
Le poison à mon corps unit mes vêtements ;
Et ma peau, qu’avec eux votre secours m’arrache,
Pour suivre votre main de mes os se détache.
Voyez comme mon sang en coule à gros ruisseaux :
Ne me déchirez plus, officieux bourreaux ;
Votre pitié pour moi s’est assez hasardée ;
Fuyez, ou ma fureur vous prendra pour Médée.
C’est avancer ma mort que de me secourir ;
Je ne veux que moi-même à m’aider à mourir.
Quoi ! vous continuez, canailles infidèles !
Plus je vous le défends, plus vous m’êtes rebelles !
Traîtres, vous sentirez encor ce que je puis ;
Je serai votre roi, tout mourant que je suis ;
Si mes commandements ont trop peu d’efficace,
Ma rage pour le moins me fera faire place :
Il faut ainsi payer votre cruel secours.
(Il se défait d’eux et les chasse à coups d’épée.)