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Tu peux connaître aussi quelle douleur me presse.
Je me sens déchirer le cœur à son départ :
Créuse en ses malheurs prend même quelque part,
Ses pleurs en ont coulé ; Créon même soupire,
Lui préfère à regret le bien de son empire
Et si dans son adieu son cœur moins irrité
En voulait mériter la libéralité ;
Si jusque-là Médée apaisait ses menaces,
Qu’elle eût soin de partir avec ses bonnes grâces,
Je sais (comme il est bon) que ses trésors ouverts
Lui seraient sans réserve entièrement offerts,
Et malgré les malheurs où le sort l’a réduite,
Soulageraient sa peine et soutiendraient sa fuite.

Nérine.

Puisqu’il faut se résoudre à ce bannissement,
Il faut en adoucir le mécontentement.
Cette offre y peut servir ; et par elle j’espère,
Avec un peu d’adresse, apaiser sa colère
Mais, d’ailleurs, toutefois n’attendez rien de moi,
S’il faut prendre congé de Créuse et du roi ;
L’objet de votre amour et de sa jalousie
De toutes ses fureurs l’aurait tôt ressaisie.

Jason.

Pour montrer sans les voir son courage apaisé,
Je te dirai, Nérine, un moyen fort aisé ;