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Au-dessus du mépris, comme au-dessus des lois.
On doit toujours respect au sceptre, à la couronne.
Remets tout, si tu veux, aux ordres que je donne ;
Je saurai l’apaiser avec facilité,
Si tu ne te défends qu’avec civilité.


Scène IV.

Jason, Créuse, Cléone.


Jason.

Que ne vous dois-je point pour cette préférence,
Où mes désirs n’osaient porter mon espérance !
C’est bien me témoigner un amour infini,
De mépriser un roi pour un pauvre banni !
À toutes ses grandeurs préférer ma misère !
Tourner en ma faveur les volontés d’un père !
Garantir mes enfants d’un exil rigoureux !

Créuse.

Qu’a pu faire de moindre un courage amoureux ?
La fortune a montré dedans votre naissance
Un trait de son envie, ou de son impuissance ;
Elle devait un sceptre au sang dont vous naissez,
Et sans lui vos vertus le méritaient assez.
L’amour, qui n’a pu voir une telle injustice,
Supplée à son défaut, ou punit sa malice,
Et vous donne, au plus fort de vos adversités,
Le sceptre que j’attends, et que vous méritez.
La gloire m’en demeure ; et les races futures,
Comptant notre hyménée entre vos aventures,
Vanteront à jamais mon amour généreux,