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L’irriter, ou moi-même avec toi me trahir.
À moins que de changer, sa haine inévitable
Me rend de tous côtés ma perte indubitable ;
Je ne puis conserver mon devoir et ma foi,
Ni sans crime brûler pour d’autres ni pour toi.

Florame.

Le nom de cet amant, dont l’indiscrète envie
À mes ressentiments vient apporter sa vie ?
Le nom de cet amant, qui, par sa prompte mort
Doit, au lieu du vieillard, me réparer ce tort,
Et qui, sur quelque orgueil que son amour se fonde,
N’a que jusqu’à ma vue à demeurer au monde ?

Daphnis.

Je n’aime pas si mal que de m’en informer ;
Je t’aurais fait trop voir que j’eusse pu l’aimer.
Si j’en savais le nom, ta juste défiance
Pourrait à ses défauts imputer ma constance,
À son peu de mérite attacher mon dédain,
Et croire qu’un plus digne aurait reçu ma main.
J’atteste ici le bras qui lance le tonnerre,
Que tout ce que le ciel a fait paraître en terre
De mérites, de biens, de grandeurs et d’appas,
En même objet uni, ne m’ébranlerait pas :
Florame a droit lui seul de captiver mon âme ;
Florame vaut lui seul à ma pudique flamme