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Nanceium, viso vix bene Rege, patet.
Richelius tanto ingentes sub principe curas 55
Explicat, et tantis pars bona rebus adest ;
Nec pretiosam animam Lodoïci impendere palmis,
Aut patriæ dubitet postposuisse bonis.
Tempora rimatur, pavidum ruiturus in hostem,
Et ruit, et solo nomine sæpe domat. 60
Nestora Richelius, Rex vincere possit Achillem[1].
Hæc levibus metris credere, quale nefas !
Tanta canant quorum præcordia Cynthius urget
Plenior, et mentem grandior æstus agit :
Sit satis ad nostros plausisse utrumque lepores ; 65
Forsitan et nomen novit uterque meum.
Laudibus apta minus, curis fuit apta levandis

    aux forces du monde entier, Nancy, aperçoit à peine le Roi qu’elle ouvre ses portes. Richelieu, sous un tel prince, dénoue les plus grandes difficultés : il est pour sa bonne part dans de si belles choses, et n’hésite pas à consacrer à la gloire de Louis sa précieuse existence, à laquelle il préfère le bien de la patrie. Prêt à s’élancer sur un ennemi tremblant, il cherche l’occasion favorable, s’élance enfin, et le dompte souvent par le seul prestige de son nom. Richelieu eût pu l’emporter sur Nestor ; le Roi, sur Achille. Confier de tels sujets à une muse légère, quel crime ! Qu’ils les chantent, ceux qu’Apollon dévore d’une flamme plus vive et dont un sublime transport agite l’esprit. Qu’il nous suffise que ces deux héros aient applaudi à nos jeux : peut-être connaissent-ils mon nom l’un et l’autre. Peu propre à célébrer leurs louanges, Melpomène du moins l’a été à calmer

  1. C’est ici un des lieux communs habituels des compliments adressés à Richelieu et à Louis XIII. On lit à la page 76 des Sacrifices des Muses, dans une pièce de vers de Faret intitulée : Pour Monseigneur le cardinal-duc de Richelieu, ode :
    L’un pèse tout exactement,
    L’autre exécute en un moment ;
    L’un sait plus que Nestor, l’autre fait plus qu’Achille.