Debout, tête une, à genoux,
Triste, gaillard, rêveur, jaloux ;
Je courois, je faisois la grue
Tout un jour au bout d’une rue :
Soleils, flambeaux, attraits, appas,
Pleurs, désespoirs, tourments, trépas,
Tout ce petit meuble de bouche
Dont un amoureux s’escarmouche,
Je savois bien m’en escrimer[1].
Par là je m’appris à rimer ;
Par là je fis sans autre chose
Un sot en vers d’un sot en prose ;
Et Dieu sait alors si les feux,
Les flammes, les soupirs, les vœux,
Et tout ce menu badinage,
Servoit[2] de rime et de remplage[3].
- ↑ Corneille a donné de curieux échantillons de ces « discours de livre, » comme il les appelle, dans Mélite (tome I, p. 146 et 147, vers 61-78) et dans la Veuve (tome I, p. 412, vers 250-266). On trouve aussi dans la comédie, ou plutôt dans le dialogue intitulé Climène, publié par la Fontaine en 1671, une satire fort délicate des poésies galantes du dix-septième siècle :
Érato.
Mais n’est-ce point assez célébré notre belle ?
Quand j’aurai dit les jeux, les ris et la séquelle,
Les grâces, les amours : voilà fait à peu près.
Apollon.
Vous pourrez dire encor les charmes, les attraits,
Les appas.
Érato.
Et puis quoi ?
Apollon.
Cent et cent mille choses.
Je ne vous ai conté ni les lis ni les roses :
On n’a qu’à retourner seulement ces mots-là.
Voyez encore ci-après, p. 30, note 2, et p. 33, note 1. - ↑ On lit ainsi servoit, au singulier, dans l’édition originale.
- ↑ Remplissage.