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VI


(Voyez la Notice, p. 18 et 19.)
DEUX SONNETS SIGNÉS C.,
Publiés dans les Poésies choisies, chez Sercy, et attribués par M. P. Lacroix à Pierre Corneille.

Sonnet publié à la page 304 de la première partie des Poésies choisies, en 1653.

Une troupe servile, inconstante, folâtre,
Au service d’autrui passe ses plus beaux jours,
Et croit avoir grand’part à la splendeur des cours,
Où l’on voit que le luxe a doré jusqu’au plâtre.

Mais la vertu n’est là que vertu de théâtre : 5
Le vice y tient l’empire et porte le velours ;
Les fourbes sont adroits ; les bons, des esprits lourds[1] ;
Enfin pour s’avancer il faut être idolâtre.

Pour moi, je m’en retire, instruit à mes dépens
Que de vivre en esclave est un malheur extrême 10
Qu’accompagnent toujours mille soucis flottants.

Aux autres j’ai vécu ; je veux vivre à moi-même,
Sans avoir de mes faits l’univers pour témoin :
Si j’ai moins de désirs, je n’ai pas tant de soin.




Sonnet imprimé à la page 365 de la réimpression, de 1658, de la troisième partie des Poésies choisies, publiées d’abord en 1656.

Que me sert qu’on m’écoute avec tant de transports ?
Bien loin de s’avancer, ma fortune recule,
Et si[2] d’aller plus outre on fait un tel scrupule
Qu’Apollon est le seul qui m’ouvre ses trésors.
 

  1. L’édition originale porte sourds, au lieu de lourds.
  2. Si a ici le sens de pourtant ; il exprime une opposition et non un doute.