De moi[1], je ne veux point, comme le bas vulgaire,
De tes divers emplois pénétrer le mystère :
Je ne m’introduis point dans le palais des grands,
Et me fais un secret de ce que j’y comprends ;
Mais je te vois alors comme un autre Moïse,
Quand le peuple de Dieu, par sa seule entremise,
Sur le mont de Sina[2] reçut la sainte loi
À travers les carreaux, la terreur et l’effroi.
De sa haute faveur les tribus étonnées
Au pied du sacré mont demeuroient prosternées,
Pendant que ce prophète, élevé dans ce lieu,
Dans un nuage épais parloit avec son Dieu,
Sacris latescens quid penetralibus
Volvas, opinari temeraria
Plebs ausit ; occultata regum
Mirer ego, sileamque cautus.
Sic quando Moses colloquiis Dei,
Caliginoso culmine conditus,
Gauderet, ac voces arnicas
Auribus exciperet beatis,
Dignationem numinis, et viri
Vix mussitantes Abramidum tribus
Sortem stupebant insolentem :
Ille homines rediens ad imos,
Fœtos superni luminis et Dei
- ↑ De moi, « quant à moi, pour moi. » Voyez le Lexique. — Lefèvre et quelques autres éditeurs ont mis : Pour moi.
- ↑ Des deux formes bibliques Sina et Sinaï, Racine a employé, comme ici Corneille, la première au vers 4 d’Athalie :
… La fameuse journée
Où sur le mont Sina la loi nous fut donnée ;
et la seconde dans le premier chœur de la même pièce :
O mont de Sinaï, conserve la mémoire.