Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 10.djvu/314

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

C’est ce que dit tout Paris à son tour.
Il part, et la Frayeur, chez les siens inconnue,
Annonce en même temps parmi vous sa venue.
La Victoire le suit dans une majesté 40
Dont l’inexorable fierté
Semble du ciel autorisée
À venger le mépris d’une paix refusée
Avec tant de témérité ;
Et commençant par un miracle, 45
Bellone fait partout retentir cet oracle :
« Ennemis de la paix, vous la voudrez trop tard :
Le ciel ne peut aimer ceux qui troublent la terre ;
Et je vous le dis de sa part,
La guerre punira ceux qui veulent la guerre. » 50
L’Anglois avec chaleur souscrit à cet arrêt ;
Au belliqueux Suédois également il plaît ;
Le Danois en frémit, Brandebourg s’en alarme[1] ;

    Aulæ non unquam discors Lutetia clamat.
    Hæc inter, Euris ocior
    Per tremefacta sola
    It currus ; Pavor antevolat ; Victoria, pacis
    Ultura contemptum decus,
    Pone fremens sequitur.
    Quaque via est, Bellona truci sic intonat ore :
    « Belli ferent dispendia
    Quos fera bella juvant ;
    Et fœdus sanxisse volent. » Lætum accipit omen
    Sequester Anglus fœderis ;
    Accipit Hermioni
    Et levibus Danis infensa Suecia ; miles

  1. C’était par la médiation de Charles II, roi d’Angleterre, que les lentes négociations de Nimègue s’étaient ouvertes en 1675. Charles XI, roi de Suède, allié de Louis XIV, combattait contre les Danois, unis aux Hollandais, et avait envoyé l’année précédente (1675) une armée dans le Brandebourg, dont l’Électeur, rompant le traité