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De tant de nations flatte encor l’origine,
Ces remparts que la Grèce et tant de dieux ligués
En deux lustres à peine ont pu voir subjugués,
Eurent moins de défense, et l’art en leur structure
Avoit moins secouru l’effort de la nature ; 170
Et ton bras en dix jours a plus fait à nos yeux
Que la fable en dix ans n’a fait faire à ses dieux.
Ainsi, par des succès que nous n’osions attendre,
Ton État voit sa borne au milieu de la Flandre ;
Et la Flandre, qui craint de plus grands changements, 175
Voit ses fleuves captifs[1] diviser ses Flamands.
C’est là ton pur ouvrage, et ce qu’en vain ta France
Elle-même a tenté sous une autre puissance[2] ;
Ce que sembloit le ciel défendre à nos souhaits,
Ce qu’on n’a jamais vu, qu’on ne verra jamais, 180
Ce que tout l’avenir à peine voudra croire…

    Limite divisos per mille pericula Belgas.
    Teque adeo denos vix expugnanda per annos,
    Ilios ut quondam, Superum labor, acribus intus
    Fœta viris pariter, largoque interrita cinctu
    Insula, te decimus transmissam in Gallica vidit
    Jura dies, et plura ingens hic præstitit heros
    Quam potuit junctis affingere fabula Divis.
    Hæc rerum series, nullique parata priorum
    Gloria, nec seris æquanda nepotibus olim :
    Indomitum Flandros genus, et firmissima claustris
    Oppida, quæ nec opum vis magna, operumve ducumve,
    Nec proavi domuere, nec excita finibus omnis
    Gallia adhuc, non mille rates, non mille carinæ,
    Frænare imperiis, armisque metuque subacta
    Præcipiti ad nutum sibi posse adjungere bello,
    Herois labor ille fuit. Sed nec mihi cuncta

  1. Le P. de la Rue a nommé un peu plus haut la Sambre et l’Escaut (Sabis, Scaldis).
  2. Philippe le Bel conquit le comté de Flandre, puis le perdit. Voyez aussi ce qui est dit plus loin de Philippe Auguste, aux vers 253-258.