Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 10.djvu/126

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

 

Hesdin[1].

À peine de Hesdin les murs sont renversés,
Que sur l’affreux débris des bastions forcés
Tu reçois le bâton de la main de ton maître,
Généreux maréchal : c’est de quoi nous ravir,
De le voir aussi prompt à te bien reconnoître 105
Que ta haute valeur fut prompte à le servir.


La Protection de Portugal et de Catalogne[2].

Que le ciel vous fut doux, lorsque dans votre effroi
Il vous sollicita de courir à mon roi
Pour voir contre vos murs la liberté renaître[3] !
Le succès à l’instant suivit votre désir. 110
Peuples, qui recherchez ou protecteur ou maître,
Par cet heureux exemple apprenez à choisir[4].

  1. Le 30 juin 1639, Hesdin, ville de l’Artois, se rendit au Roi, qui donna sur la brèche le bâton de maréchal à M. de la Meilleraie.
  2. En 1640 le Portugal secoua le joug de l’Espagne, appela au trône Jean de Bragance, qui régna sous le nom de Jean IV, et fit alliance avec la France. Dans le même temps les Catalans se révoltèrent et chassèrent les garnisons espagnoles ; puis, l’année suivante, ils firent un traité avec Louis XIII, par lequel ils déclarèrent leur province réunie à la France, sous la seule condition de garder ses libertés.
  3. Emicet ut vestris libertas obruta muris, dit le latin. — Contre paraît avoir ici, comme souvent alors, le sens de près de, à côté de, comme dans ce passage de la Critique de l’École des femmes de Molière (scène v) : « Dorilas, contre qui j’étois, a été de mon avis. » Dans ce cas contre vos murs équivaudrait à peu près à sous vos murs, au pied de vos murs. Granet a remplacé contre par entre.
  4. On est frappé du singulier rapport de forme que ce vers présente avec le dernier du Menteur (tome IV, p. 239) :
    Par un si rare exemple apprenez à mentir.