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Manto[1], tu ne vois point soupirer ta province
Dans l’attente d’un bien qu’on espère et qui fuit ;
Et de sa main à peine a-t-il tari tes larmes,
Que sa France en la tienne aussitôt met ses armes, 75
Que la gloire couronne, et la victoire suit.


La Paix d’Aletz[2].

Que ce fut un spectacle, Aletz, doux à tes yeux,
Quand tu vis à ses pieds ces peuples factieux
Trouver plus de bonté qu’ils n’avoient eu d’audace !
Apprenez de mon prince, ô monarques vainqueurs, 80
Que c’est peu fait à vous de reprendre une place,
Si vous ne trouvez l’art de regagner les cœurs.


Paix accordée aux chefs des rebelles[3].

La Paix voit ce pardon d’un œil indifférent,
Et ne veut rien devoir au parti qui se rend,

  1. On voit figurer dans la gravure la nymphe à qui, si nous en croyons Virgile, la ville de Mantoue devait son nom. Manto était mère d’Ocnus, fondateur de Mantoue.
    Fatidicæ Mantus et Tusci filius amnis,
    Qui muros, matrisque dedit tibi, Mantua, nomen.
    (Énéide, livre X, vers 199 et 200.)
  2. Le 9 juin 1629 Louis XIII assiégea la ville d’Alais dans les Cévennes. Elle capitula dès le 16 du même mois.
  3. L’édit de pacification fut rendu à Nîmes le 27 juin 1629. Ce fut la dernière paix de religion. On laissa aux protestants la liberté du culte, mais on leur enleva leurs places de sûreté, et ils cessèrent de former comme un État dans l’État. — Ces vers ont quelque obscurité ; la vue de la gravure ne la dissipe pas. Elle représente la Paix appuyée sur un tronc d’arbre et regardant en effet avec indifférence les chefs des rebelles prosternés aux pieds du Roi. Les vers latins, qui sont d’ordinaire la traduction des vers français, s’en éloignent ici beaucoup ; les voici :
    Imbelle veslrum crimen ; et parcit pius