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Par ton nouveau héros m’en a récompensé.
C’est toi, grand cardinal, âme[1] au-dessus de l’homme,
Rare don qu’à la France ont fait le ciel et Rome, 10
C’est toi, dis-je, ô héros, ô cœur vraiment romain,
Dont Rome en ma faveur vient d’emprunter la main.
Mon bonheur n’a point eu de douteuse apparence[2] :
Tes dons ont devancé même mon espérance ;
Et ton cœur généreux m’a surpris d’un bienfait 15
Qui ne m’a pas coûté seulement un souhait.
La grâce en affoiblit[3] quand il faut qu’on l’attende :
Tel pense l’acheter alors qu’il la demande ;
Et c’est je ne sais quoi d’abaissement secret
Où quiconque a du cœur ne consent qu’à regret. 20
C’est un terme honteux que celui de prière :

    Par virtute suis patribus novus emicat heros,
    Maxima qui tenui pro munere dona refundit.
    Te duce, magne héros, quo nil sublimius æther
    Francigenis, et nil melius dedit Itala tellus,
    Juli, purpurea flamen dignissime palla,
    Te duce, Roma suos, largo in me prodiga fœtu,
    Fudit opes, nec in ancipiti fortuna pependit :
    Spem merces oblata præit ; Charitesque profusa
    Occurrere manu ; quodque est mirabile, munus
    Non optare licet, tu me auri pondere sponte
    Obruis, et votis potior non ante cupitis.
    Gratia quæ petitur subito evolat, et prece emaci
    Qui prior ambit opes, tacitum sub pectore vulnus
    Sentit, et invitas concesso munere gaudet ;
    Nam pudor est, verba et vultum præferre precantis.

  1. On lit ici dans le Recueil de 1671, dans les Œuvres diverses de 1738 et dans toutes les éditions postérieures : homme, au lieu de âme.
  2. Var. Mon honneur n’a point eu de douteuse apparence.
    (Elogia, Recueil et Œuvres diverses.)
  3. Affoiblit est pris dans le sens neutre, comme se prend le simple foiblir. Voyez le Lexique. — Le Recueil, les Œuvres diverses, et toutes les éditions postérieures portent. La grâce s’affoiblit.