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ACTE IV, SCÈNE VIII.
ALCIDON.

Oui, de tout mon pouvoir je t’en viens conjurer.

DORIS.

À ce coup, Alcidon, voilà te déclarer ;
Ce compliment, fort beau pour des âmes glacées,
M’est un aveu bien clair de tes feintes passées.

ALCIDON.

1505Ne parle point de feinte ; il n’appartient qu’à toi
D’être dissimulée et de manquer de foi ;
L’effet l’a trop montré.

DORIS.

L’effet l’a trop montré.L’effet a dû t’apprendre,
Quand on feint avec moi, que je sais bien le rendre.
Mais je reviens à toi. Tu fais donc tant de bruit
1510Afin qu’après un autre en recueille le fruit ;
Et c’est à ce dessein que ta fausse colère
Abuse insolemment de l’esprit de mon frère ?

ALCIDON.

Ce qu’il a pris de part en mes ressentiments
Apporte seul du trouble à tes contentements[1] ;
1515Et pour moi, qui vois trop ta haine par ce change
Qui t’a fait sans raison me préférer Florange[2],
Je n’ose plus t’offrir un service odieux.

DORIS.

Tu ne fais pas tant mal. Mais pour faire encor mieux,
Puisque tu reconnois ma véritable haine,
1520De moi ni de mon choix ne te mets point en peine,
C’est trop manquer de sens ; je te prie, est-ce à toi,
À l’objet de ma haine, à disposer de moi ?

ALCIDON.

Non ; mais puisque je vois à mon peu de mérite
De ta possession l’espérance interdite,

  1. Var. Seul apporte du trouble à tes contentements. (1634-57)
  2. Var. Où tu m’as préféré ce lourdaud de Florange. (1634-57)