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LA VEUVE.

Ses offres acceptés[1], que rien ne se diffère ;
Après un prompt hymen, tu le mets à pis faire[2].

ALCIDON.

Cet ordre est infaillible à procurer mon bien ;
1330Mais ton contentement m’est plus cher que le mien,
Longtemps à mon sujet tes passions contraintes
Ont souffert et caché leurs plus vives atteintes ;
Il me faut à mon tour en faire autant pour toi :
Hier devant tous les Dieux je t’en donnai ma foi,
1335Et pour la maintenir tout me sera possible[3].

CÉLIDAN.

Ta perte en mon bonheur me seroit trop sensible[4] ;
Et je m’en haïrois, si j’avois consenti[5]
Que mon hymen laissât Alcidon sans parti.

ALCIDON.

Eh bien, pour t’arracher ce scrupule de l’âme
1340(Quoique je n’eus jamais pour elle aucune flamme),
J’épouserai Clarice. Ainsi, puisque mon sort
Veut qu’à mes amitiés je fasse un tel effort,
Que d’un de mes amis j’épouse la maîtresse.
C’est là que par devoir il faut que je m’adresse.
1345Philiste est un parjure, et moi ton obligé[6] :
Il m’a fait un affront, et tu m’en as vengé.

  1. Tel est le texte de toutes les éditions. Voyez au sujet du genre du mot offre, l’introduction grammaticale en tête du Lexique.
  2. Mettre quelqu un au pis, a pis faire « se dit par manière de défi, pour marquer à un homme que quelque volonté qu’il ait de nuire, on ne le craint point. » (Dictionnaire de l’Académie de 1694.)
  3. Var. Et pour la maintenir j’éteindrai bien ma braise.
    cél. Mais je ne veux point d’heur aux dépens de ton aise. (1634)
  4. Var. Ta perte en mon bonheur te seroit trop sensible. (1644-60)
  5. Var. Et j’aurois un regret trop sensible de voir (a)
    Que mon hymen laissât Alcidon à pourvoir. (1634-57)
    (a). Et moi-même j’aurois trop de regret de voir. (1644-57)
  6. Var. Philiste m’est parjure, et moi ton obligé. (1634-63)