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LA VEUVE.

On n’a point encor vu que ce manque de cœur
M’ait rendu le dernier où vont les gens d’honneur.
975Je te veux bien ôter tout sujet de colère ;
Et quoi que de ma sœur ait résolu ma mère,
Dût mon peu de respect irriter tous les Dieux,
J’affronterai Géron et Florange à ses yeux.
Mais après les efforts de cette déférence[1],
980Si tu gardes encor la même violence,
Peut-être saurons-nous apaiser autrement
Les obstinations de ton emportement.

ALCIDON, seul.

Je crains son amitié plus que cette menace :
Sans doute il va chasser Florange de ma place.
985Mon prétexte est perdu, s’il ne quitte ces soins[2] :
Dieux ! qu’il m’obligeroit de m’aimer un peu moins !


Scène IV.

CHRYSANTE, DORIS.
CHRYSANTE.

Je meure, mon enfant, si tu n’es admirable !
Et ta dextérité me semble incomparable :
Tu mérites de vivre après un si beau tour[3].

DORIS.

990Croyez-moi qu’Alcidon n’en sait guère en amour ;
Vous n’eussiez pu m’entendre, et vous garder de rire[4].


    Sitôt que j’aurai pu me rendre chez ma mère,
    Dût mon peu de respect offenser tous les Dieux. (1634-57)

  1. Var. Je souffre jusque-là ton humeur violente ;
    Mais, ces devoirs rendus, si rien ne te contente,
    Sache alors que voici de quoi nous apaisons
    Quiconque ne veut pas se payer de raisons. (1634-57)
  2. Var. Mon prétexte est perdu, s’il ne quitte ses soins. (1664 et 68)
  3. Var. Tu mérites de vivre après un si bon tour. (1634-68)
  4. Var. Vous n’eussiez pu m’entendre, et vous tenir de rire. (1634-57)