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XLVII
SUR PIERRE CORNEILLE.

ne suis pas d’accord avec M. d’Aubignac de tout le bien même qu’il a dit de moi[1]. »

Il eut l’ambition fort légitime de prendre à son tour la parole sur des questions qu’il avait si bien étudiées et qui lui importaient si fort, et joignit à son édition de 1660 trois Discours sur le théâtre, et des Examens de chacune de ses pièces représentées jusqu’à cette époque.

Corneille prend au début de ce travail un ton modéré et modeste, qu’on peut regarder comme une adroite critique de celui de d’Aubignac : « Je hasarderai quelque chose, dit-il, sur cinquante ans de travail pour la scène, et en dirai mes pensées tout simplement, sans esprit de contestation qui m’engage à les soutenir, et sans prétendre que personne renonce en ma faveur à celles qu’il en aura conçues[2]. » Ces paroles adressées au public se trouvent commentées par les explications que Corneille donne à l’abbé de Pure, dans la lettre que nous avons déjà citée[3] : « Bien que je contredise quelquefois M. d’Aubignac et Messieurs de l’Académie, je ne les nomme jamais, et je ne parle non plus d’eux que s’ils n’avoient point parlé de moi. »

On ne saurait trop apprécier chez l’impétueux auteur de l’Excuse à Ariste et de la Lettre apologétique les modifications que l’âge et l’expérience avaient apportées à son tempérament littéraire. Il a su si heureusement, et avec une si habile modération, faire dominer dans son nouveau travail la forme du précepte et de la fine observation, que les lecteurs qui négligent de lire la lettre à l’abbé de Pure avant d’aborder les Discours sur le théâtre et les Examens, peuvent prendre cette défense, adroite et souvent solide, pour un simple traité théorique.

Au commencement de l’année 1661, nous trouvons Corneille fort occupée des démarches à faire pour placer son second fils comme page chez la duchesse de Nemours[4], démarches couronnées, du reste, d’un prompt succès. Vers la fin de la même année, une curieuse lettre à l’abbé de Pure[5], jusqu’ici

  1. Tome X, p. 486.
  2. Tome I, p. 16.
  3. Tome X, p. 487.
  4. Voyez tome X, p. 488 et 489.
  5. Voyez tome X, p. 489-492.