[1] :
La beauté dont mon traître adore les attraits[2]
Chaque soir au jardin va prendre un peu de frais ;
J’en ai su de lui-même ouvrir la fausse porte ;
Étant seule, et de nuit, le moindre effort l’emporte.
Allons-y dès ce soir : le plus tôt vaut le mieux ;
Et surtout déguisés, dérobons à ses yeux,
Et de nous, et du coup, l’entière connoissance.
Si Clarice une fois est en notre puissance,
Crois que c’est un bon gage à moyenner l’accord,
Et rendre, en le faisant, ton parti le plus fort[3].
Mais pour la sûreté d’une telle surprise[4],
Aussitôt que chez moi nous pourrons l’avoir mise,
Retournons sur nos pas, et soudain effaçons
Ce que pourroit l’absence engendrer de soupçons.
Et déjà je prépare une froide impudence
À m’informer demain, avec étonnement,
De l’heure et de l’auteur de cet enlèvement.
Adieu ; j’y vais mettre ordre.
Je n’ai goutte de sang que pour toi je n’épanche.