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ACTE II, SCÈNE VI.

740Elle a cru me braver, mais je n’en fais que rire ;
Et comme j’étois las tic me contraindre tant,
La coquette qu’elle est m’oblige en me quittant.
Ne m’apprendras-tu point ce que fait ta maîtresse ?

LA NOURRICE.

Elle met ton agente au bout de sa finesse.
745Philiste assurément tient son esprit charmé :
Je n’aurois jamais cru qu’elle l’eût tant aimé[1].

ALCIDON.

C’est à faire à du temps.

LA NOURRICE.

Quitte cette espérance :
Ils ont pris l’un de l’autre une entière assurance,
Jusqu’à s’entre-donner la parole et la foi.

ALCIDON.

750Que tu demeures froide en te moquant de moi !

LA NOURRICE.

Il n’est rien de si vrai ; ce n’est point raillerie.

ALCIDON.

C’est donc fait d’Alcidon ! Nourrice, je te prie…

LA NOURRICE.

Rien ne sert de prier ; mon esprit épuisé[2]
Pour divertir[3] ce coup n’est point assez rusé.
755Je n’en sais qu’un moyen, mais je ne l’ose dire[4]. 755

ALCIDON.

Dépêche, ta longueur m’est un second martyre.

LA NOURRICE.

Clarice, tous les soirs, rêvant à ses amours,
Seule dans son jardin fait trois ou quatre tours.

ALCIDON.

Et qu’a cela de propre à reculer ma perte ?

  1. Var. Je n’eusse jamais cru qu’elle l’eût tant aimé. (1634-60)
  2. Var. Tu m’as beau supplier ; mon esprit épuisé. (1634-60)
  3. Divertir, détourner.
  4. Var. Je ne sais qu’un moyen, mais je ne l’ose dire. (1634-60)