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CLITANDRE.

Et je m’étonne fort comme ils n’ont dans ton âme
Rétabli ta raison ou dissipé ta flamme.

CLITANDRE.

Quelques charmes secrets mêlés dans ses rigueurs
480Étouffent en naissant la révolte des cœurs ;
Et le mien auprès d’elle, à quoi qu’il se dispose,
Murmurant de son mal, en adore la cause.

FLORIDAN.

Mais puisque son dédain, au lieu de te guérir,
Ranime ton amour, qu’il dût faire mourir[1],
485Sers-toi de mon pouvoir ; en ma faveur, la Reine
Tient et tiendra toujours Rosidor en haleine ;
Mais son commandement dans peu, si tu le veux,
Te met, à ma prière, au comble de tes vœux.
Avise donc ; tu sais qu’un fils peut tout sur elle.

CLITANDRE.

490Malgré tous les mépris de cette âme cruelle,
Dont un autre a charmé les inclinations,
J’ai toujours du respect pour ses perfections[2],
Et je serois marri qu’aucune violence…

FLORIDAN.

L’amour sur le respect emporte la balance.

CLITANDRE.

495Je brûle ; et le bonheur de vaincre ses froideurs,
Je ne le veux devoir qu’à mes vives ardeurs[3] ;
Je ne la veux gagner qu’à force de services.

FLORIDAN.

Tandis tu veux donc vivre en d’éternels supplices ?

CLITANDRE.

Tandis ce m’est assez qu’un rival préféré

  1. Var. Ranime tes ardeurs, qu’il dût faire mourir. (1632-57)
  2. Var. Le respect que je porte à ses perfections
    M’empêche d’employer aucune violence. (1632-57)
  3. Var. Je ne le veux devoir qu’à mes chastes ardeurs. (1632-57)