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CLITANDRE.

et le Prince le désirent, leur donnant jusques à la guérison de Rosidor pour allumer cette flamme,

Afin de voir alors cueillir en même jour
À deux couples d’amants les fruits de leur amour[1].


EXAMEN.

Un voyage que je fis à Paris pour voir le succès de Mélite m’apprit qu’elle n’étoit pas dans les vingt et quatre[2] heures : c’étoit l’unique règle que l’on connût en ce temps-là. J’entendis que ceux du métier la blâmoient de peu d’effets, et de ce que le style en étoit[3] trop familier. Pour la justifier contre cette censure par une espèce de bravade, et montrer que ce genre de pièces avoit les vraies beautés de théâtre, j’entrepris d’en faire une régulière (c’est-à-dire dans ces vingt et quatre heures), pleine d’incidents, et d’un style plus élevé, mais qui ne vaudroit rien du tout : en quoi je réussis parfaitement[4]. Le style en est véritablement plus fort que celui de l’autre ; mais c’est tout ce qu’on y peut trouver de supportable. Il est mêlé[5] de pointes comme dans cette première ; mais ce n’étoit pas alors un si grand vice dans le choix des pensées, que la scène en dût être entièrement purgée. Pour la constitution, elle est si désordonnée, que vous avez de la peine à deviner qui sont les premiers acteurs. Rosidor et Caliste sont ceux qui le paroissent le plus par l’avantage de leur caractère et de leur amour mutuel ;

  1. Ce sont, à peu près, les deux vers qui terminent la pièce :
    Ainsi nous verrons lors cueillir en même jour, etc.
  2. Var. (édit. de 1660) : vingt-quatre. De même six lignes plus bas.
  3. Var. (édit. de 1660) : de ce que le style étoit.
  4. Voyez la Notice, p. 258.
  5. Var. (édit. de 1660) : il est encor mêlé.