Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 1.djvu/365

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
239
ACTE V, SCÈNE IV.

Beaux yeux, à mon transport pardonnez ce blasphème,
La bouche est impuissante où l’amour est extrême :
1625Quand l’espoir est permis, elle a droit de parler ;
Mais vous allez plus loin qu’elle ne peut aller.
Ne vous lassez donc point d’en usurper l’usage,
Et quoi qu’elle m’ait dit, dites-moi davantage.
Mais tu ne me dis mot, ma vie ; et quels soucis
1630T’obligent à te taire auprès de ton Tircis ?

MÉLITE.

Tu parles à mes yeux, et mes yeux te répondent.

TIRCIS.

Ah ! mon heur, il est vrai, si tes désirs secondent
Cet amour qui paroît et brille dans tes yeux,
Je n’ai rien désormais à demander aux Dieux.

MÉLITE.

1635Tu t’en peux assurer : mes yeux si pleins de flamme
Suivent l’instruction des mouvements de l’âme.
On en a vu l’effet, lorsque ta fausse mort
A fait sur tous mes sens un véritable effort[1] ;
On en a vu l’effet, quand te sachant en vie,
1640De revivre avec toi j’ai pris aussi l’envie[2] ;
On en a vu l’effet, lorsqu’à force de pleurs
Mon amour et mes soins, aidés de mes douleurs,
Ont fléchi la rigueur d’une mère obstinée,
Et gagné cet aveu qui fait notre hyménée[3].
1645Si bien qu’à ton retour ta chaste affection
Ne trouve plus d’obstacle à sa prétention[4].

  1. Var. Fit dessus tous mes sens un véritable effort. (1633-57)
  2. Var. De revivre avec toi je pris aussi l’envie. (1633-57)
  3. Var. Lui faisant consentir notre heureux hyménée. (1633-57)
  4. Var. Nous trouve toutes deux à sa dévotion ;
    Et cependant l’abord (a) des lettres d’un faussaire. (1633-57)
    Var. Ne trouve plus d’obstacle à ta prétention ;
    Et le premier aspect des lettres d’un faussaire. (1660)
    (a). L’édition de 1657 donne, par erreur, d’abord pour l’abord.