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MÉLITE.
CLORIS.

Quand il n’en auroit point de plus justes raisons,
La parole donnée, il faut que l’on la tienne.

MÉLITE.

Cela fait contre vous : il m’a donné la sienne.

CLORIS.

Oui ; mais ayant déjà reçu mon amitié,
1190Sur un vœu solennel d’être un jour sa moitié[1],
Peut-il s’en départir pour accepter la vôtre ?

MÉLITE.

De grâce, excusez-moi, je vous prends pour une autre,
Et c’étoit à Cloris que je croyois parler.

CLORIS.

Vous ne vous trompez pas.

MÉLITE.

Vous ne vous trompez pas.Donc, pour mieux me railler[2],
1195La sœur de mon amant contrefait ma rivale ?

CLORIS.

Donc, pour mieux m’éblouir, une âme déloyale[3]
Contrefait la fidèle ? Ah ! Mélite, sachez
Que je ne sais que trop ce que vous me cachez.
Philandre m’a tout dit : vous pensez qu’il vous aime ;
1200Mais sortant d’avec vous, il me conte lui-même
Jusqu’aux moindres discours dont votre passion
Tâche de suborner[4] son inclination.

MÉLITE.

Moi, suborner Philandre ! ah ! que m’osez-vous dire !

CLORIS.

La pure vérité.

  1. Var. Sur un serment commun d’être un jour sa moitié. (1633-57)
  2. Var. Doncques, pour me railler. (1633-57)
  3. Var. Doncques, pour m’éblouir, une âme déloyale. (1663-57)
  4. Voyez plus haut, p. 184, note 3.