Apprends que les discours des filles bien sensées[1]
Découvrent rarement le fond de leurs pensées,
Et que les yeux aidant à ce déguisement.
Notre sexe a le don de tromper finement.
Apprends aussi de moi que ta raison s’égare,
Que Mélite n’est pas une pièce si rare,
Qu’elle soit seule ici qui vaille la servir[2] ;
Assez d’autres objets y sauront te ravir[3].
Ne t’inquiète point pour une écervelée
Qui n’a d’ambition que d’être cajolée,
Et rend à plaindre ceux qui flattant ses beautés[4]
Ont assez de malheur pour en être écoutés.
Damon lui plut jadis, Aristandre, et Géronte[5] ;
Éraste après deux ans n’y voit pas mieux son conte[6] ;
Elle t’a trouvé bon seulement pour huit jours ;
Philandre est aujourd’hui l’objet de ses amours,
Et peut-être déjà (tant elle aime le change[7] !)
Quelque autre nouveauté le supplante et nous venge.
Ce n’est qu’une coquette avec tous ses attraits[8] ;
Sa langue avec son cœur ne s’accorde jamais ;
Les infidélités font ses jeux ordinaires ;
Et ses plus doux appas sont tellement vulgaires,
Qu’en elle homme d’esprit n’admira jamais rien
Que le sujet pourquoi tu lui voulois du bien.
- ↑ Var. Apprends que les discours des filles mieux sensées. (1633-60)
- ↑ Qui vaille la servir, qui vaille qu’on la serve.
- ↑ Var. Tant d’autres te sauront en sa place ravir,
Avec trop plus d’attraits que cette écervelée. (1633-57) - ↑ Var. Par les premiers venus qui flattant ses beautés. (1633-57)
- ↑ Var. Ainsi Damon lui plut, Aristandre, et Géronte ;
Éraste après deux ans n’en a pas meilleur conte. (1633-57) - ↑ Voyez ci-dessus, p. 150, la note relative à la première variante.
- ↑ Var. Et peut-être demain (tant elle aime le change !). (1633-57)
- ↑ Var. Ce n’est qu’une coquette, une tête à l’évent.
Dont la langue et le cœur s’accordent peu souvent,
À qui les trahisons deviennent ordinaires,
Et dont tous les appas sont tellement vulgaires. (1633-57)