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ACTE II, SCÈNE VI.
ÉRASTE.

Il en meurt.

PHILANDRE

Il en meurt.Ce courage à l’amour si rebelle ?

ÉRASTE.

Lui-même.

PHILANDRE.

Lui-même.Si ton cœur ne tient plus qu’à demi[1],
Tu peux le retirer en faveur d’un ami[2] ;
615Sinon, pour mon regard ne cesse de prétendre :
Étant pris une fois, je ne suis plus à prendre.
Tout ce que je puis faire à ce beau feu naissant[3],
C’est de m’en revancher par un zèle impuissant[4] ;
Et ma Cloris la prie, afin de s’en distraire.
620De tourner, s’il se peut, sa flamme vers son frère[5].

ÉRASTE.

Auprès de sa beauté qu’est-ce que ta Cloris ?

PHILANDRE.

Un peu plus de respect pour ce que je chéris.

ÉRASTE.

Je veux qu’elle ait en soi quelque chose d’aimable ;
Mais enfin à Mélite est-elle comparable[6] ?

PHILANDRE.

625Qu’elle le soit ou non, je n’examine pas
Si des deux l’une ou l’autre a plus ou moins d’appas.
J’aime l’une ; et mon cœur pour toute autre insensible[7]

  1. Var. Lui-même.Si ton feu commence à te lasser. (1633)
    Var. Lui-même.Si ton feu commence à se lasser. (1644-57)
  2. Var. Pour un si bon ami tu peux y renoncer. (1633-57)
    Var. Tu peux le retirer pour un si bon ami. (1660-64)
  3. Var. Tout ce que je puis faire à son brasier naissant. (1633-68)
  4. Var. C’est de le revancher par un zèle impuissant. (1633-57)
  5. Var. De tourner ce qu’elle a de flamme vers son frère. (1633-57)
  6. Var. Mais la peux-tu juger à l’autre comparable ?
    phil. Soit comparable ou non, je n’examine pas. (1633-57)
  7. Var. J’ai promis d’aimer l’une, et c’est où je m’arrête.
    ér. Avise toutefois, le prétexte est honnête. (1633-57)