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MÉLITE.

Me donne à vos dépens de beaux sujets de rire ;
Mais je pourrois bientôt, à m’entendre flatter[1],
Concevoir quelque orgueil qu’il vaut mieux éviter.
Excusez ma retraite.

ÉRASTE.

Excusez ma retraite.Adieu, belle inhumaine,
210De qui seule dépend et ma joie et ma peine[2].

MÉLITE.

Plus sage à l’avenir, quittez ces vains propos,
Et laissez votre esprit et le mien en repos.


Scène III.

ÉRASTE, TIRCIS.
ÉRASTE.

Maintenant suis-je un fou ? mérité-je du blâme ?
Que dis-tu de l’objet ? que dis-tu de ma flamme ?

TIRCIS.

215Que veux-tu que j’en die ? elle a je ne sais quoi
Qui ne peut consentir que l’on demeure à soi.
Mon cœur, jusqu’à présent à l’amour invincible,
Ne se maintient qu’à force aux termes d’insensible,
Tout autre que Tircis mourroit pour la servir.

ÉRASTE.

220Confesse franchement qu’elle a su te ravir,
Mais que tu ne veux pas prendre pour cette belle
Avec le nom d’amant le titre d’infidèle.
Rien que notre amitié ne t’en peut détourner ;
Mais ta muse du moins, facile à suborner[3],

  1. Var. Mais outre qu’il m’est doux de m’entendre flatter,
    Ma mère qui m’attend m’oblige à vous quitter. (1633-57)
  2. Var. De qui seule dépend et mon aise et ma peine. (1633-57)
  3. Var. Mais ta muse du moins s’en lairra suborner ;
    N’est-il pas vrai, Tirsis, déjà tu la disposes
    À de puissants efforts pour de si belles choses ? (1633-57)