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peuvent être raisonnables, s’il ne croit avoir affaire à une âme assez intéressée pour déférer tout à l’éclat des richesses, ou à l’ambition du rang.

La qualité de semblables, qu’Aristote demande aux mœurs, regarde particulièrement les personnes que l’histoire ou la fable nous fait connaître, et qu’il faut toujours peindre telles que nous les y trouvons. C’est ce que veut dire Horace par ce vers :

Sit Medea ferox invictaque…

Qui peindrait Ulysse en grand guerrier, ou Achille en grand discoureur, ou Médée en femme fort soumise, s’exposerait à la risée publique. Ainsi ces deux qualités, dont quelques interprètes ont beaucoup de peine à trouver la différence qu’Aristote veut qui soit entre elles sans la désigner, s’accorderont aisément, pourvu qu’on les sépare, et qu’on donne celle de convenables aux personnes imaginées, qui n’ont jamais eu d’être que dans l’esprit du poète, en réservant l’autre pour celles qui sont connues par l’histoire ou par la fable, comme je le viens de dire.

Il reste à parler de l’égalité, qui nous oblige à conserver jusqu’à la fin à nos personnages les mœurs que nous leur avons données au commencement :

Servetur ad imum

Qualis ab incepto processerit, et sibi constet.

L’inégalité y peut toutefois entrer sans défaut, non seulement quand nous introduisons des personnes d’un