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LA VIE ET LES ŒUVRES

Vous avez ri de mes alarmes
Et vous riez encor quand je me sens mourir.

Grâce à vous, j’ai perdu le repos de ma vie ;
Votre imprudence a causé mon malheur ;
Et vous m’avez ravi jusques à la douceur
De pleurer avec mon amie.

Laissez-moi seule avec mon désespoir.
Vous ne pouvez me plaindre, ni m’entendre.
Vous causez la douleur, sans même la comprendre ;
À quoi me servirait de vous la laisser voir ?

Victime d’un amant, par vous-même trahie,
J’abhorre l’amitié, je la fuis sans retour ;
Et je vois à sa perfidie
Que l’ingrate est sœur de l’amour.

Mais un grand changement s’est fait dans la vie de madame Desbordes-Valmore. Désormais elle va se présenter à nous sous un tout autre aspect : aux orages de la passion, au déchirement du cœur ont enfin succédé des jours paisibles, des joies sereines. Les plus douces affections remplissent l’âme de Marceline ; elle est épouse aimée ; elle est mère heureuse. Son mari, il est vrai, assujetti aux pénibles conditions de sa carrière d’artiste dramatique est souvent obligé à une vie nomade, il faut alors qu’il emmène en de lointains voyages sa jeune femme et ses enfants au berceau. Mais Marceline, pour suivre partout celui qu’elle aime, a un cœur vaillant ; elle accepte, le sourire aux lèvres, les peines et les fatigues de la vie errante. Comme la simplicité et la