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DE MADAME DESBORDES-VALMORE

vre loin du pays natal, objet de son profond amour :

« Mon beau pays, mon frais berceau,
Air pur de ma verte contrée,
Lieux où mon enfance ignorée
Coulait comme un humble ruisseau !
… Un peu de ma vie ira-t-elle paisible
Se perdre sur la Scarpe au cristal argenté ?
Cette eau, qui m’a portée innocente et sensible,
Frémira-t-elle un jour sous mon sort agité ?
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Oh ! qui n’a souhaité redevenir enfant !
Dans le fond de mon cœur que je le suis souvent !
· · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · ·
Il est doux en fuyant de regarder la rive
Où naguères l’on vint jouer avec l’espoir,
Là de la vague enfance un regret, qui sommeille
Dans les fleurs du passé, tout à coup se réveille ;
Il reparaît vivant à nos yeux d’aujourd’hui ;
On tend les bras, on pleure en passant devant lui.

Ce tendre abattement vous saisit-il, mon frère,
Le soir, quand vous passez près du seuil de mon père ?
Croyez-vous voir mon père assis, calme, rêveur ?
Dites-vous à quelqu’un : « Elle était là, ma sœur ! »

Eh ! bien, racontez-moi ce qu’on fait dans nos plaines.
Peignez-moi vos plaisirs, vos jeux, surtout vos peines.
Dans l’église isolée où tu m’as dit adieu,
Mon frère, donne encor à l’aveugle qui prie ;
Dis que c’est pour ta sœur, dis, pour ta sœur chérie ;

Dis que ta sœur est triste et qu’il en parle à Dieu.
Et le vieux prisonnier de la haute tourelle