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LA VIE ET LES ŒUVRES

saurez gré sans doute de reproduire ici, en partie du moins, ces deux morceaux où le génie particulier de chacun des deux poëtes se reflète comme dans un pur miroir.

Dans ses stances, Lamartine se complait d’abord à décrire un superbe vaisseau, dominateur des mers :

« Ses voiles ouvertes et pleines
Aspiraient le souffle des flots,
Et ses vigoureuses antennes
Balançaient sur les vertes plaines
Ses ponts chargés de matelots.

La lame en vain dans la carrière
Battait en grondant ses sabords ;
Il la renvoyait en poussière,
Comme un coursier sème en arrière
La blanche écume de son mors.

Longue course à l’heureux navire !
Disais-je. En trois bonds il a fui.
La vaste mer est son empire ;
Son horizon n’a que sourire,
Et l’Univers est devant lui.

Mais ici le poëte est frappé d’un étrange contraste : ses regards, qui viennent de quitter le Géant des mers, tombent sur une humble barque, unique patrimoine et refuge d’une pauvre famille de pêcheurs  :

Ils n’ont, disais-je, dans la vie,
Que cette tente et ses trésors ;