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LA VIE ET LES ŒUVRES

Elle venait du ciel dont l’enfance est aimée…
Elle m’avait donné son prisme, don fragile ;
J’ai regardé la vie à travers ses couleurs.
Que la vie était belle ! Et dans son vol agile
Que ma jeune espérance y répandait de fleurs !
Qu’il était beau l’ombrage où j’entendais les muses
Me révéler tout bas leurs promesses confuses ;
Où j’osais leur répondre et de ma faible voix
Bégayer le serment de suivre un jour leurs lois !
D’un souvenir si doux, l’erreur évanouie
Laisse au fond de mon âme un long étonnement.
C’est une belle aurore, à peine épanouie,
Qui meurt dans un nuage… et je dis tristement :

Qu’a-t-on fait du bocage où rêvait mon enfance ?
Oh ! j’en parle toujours ; j’y voudrais être encor.
Au milieu des parfums j’y dormais sans défense,
Et le soleil sur lui versait des rayons d’or.

Après le mariage de Marceline Desbordes, son beau-père, homme de goût, qui avait été frappé du sentiment poétique et de la touchante originalité quelques romances de sa composition, lui demanda si elle n’avait pas quelques oeuvres plus importantes. « J’ai fait d’autres petites choses sans savoir. » Telle fut sa naïve réponse. Son beau-père obtint qu’elle lui lirait toutes les feuilles éparses qui contenaient ses premières poésies, et sur ses instances, elle se décida enfin à les publier. Ce premier recueil parut, comme je l’ai dit, en 1818, sous ce titre : « Élégies et romances. »

Ces années de la restauration, où Marceline Desbordes vint à son tour révéler les trésors de