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LA VIE ET LES ŒUVRES

formée, avaient subi les effets de la révocation de l’édit de Nantes, et bannis de leur pays, s’étaient réfugiés en Hollande. Ouvriers imprimeurs, ils étaient parvenus, à force de travail, à devenir propriétaires d’une importante imprimerie à Amsterdam. En 1791, deux frères Desbordes, célibataires, dirigeaient cette imprimerie et se trouvaient à la tête d’une belle fortune. Ils avaient à un haut degré l’esprit de famille et n’avaient jamais perdu le souvenir de leurs parents demeurés en France. Devenus vieux et désireux de laisser à ces parents leur opulente succession, ils s’adressèrent à l’aïeule de Marceline, laquelle, veuve d’un horloger de Douai, avait à grand peine élevé ses six enfants, et vénérable mère, conservait sur eux une grande autorité. Il y eut dans son petit logis de la rue de la Cuve d’Or, comme un conseil de famille ; un de ses fils donna lecture à haute voix de la lettre des riches parents d’Amsterdam. Dans cette lettre ils exprimaient leur pensée bien arrêtée de laisser tous leurs biens aux Desbordes de Douai ; mais ils y mettaient une condition : c’était que la mère de famille et toute sa descendance « rentreraient au sein de la religion réformée. » La délibération ne fut pas longue ; la vieille mère prit la parole et dit : que la fortune des parents de Hollande était magnifique sans doute, mais qu’elle ne valait pas le prix qu’ils y mettaient. »