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nistratives de ce genre de littérature se glissent des faits d’apparence mystérieuse qui n’ont point échappé à l’érudition et à la sagacité de l’auteur anonyme.

Beyle ne fut point ce Don Juan « à tête de boucher » dont parlent certains de ses biographes — lui-même, il est vrai, était assez flatté, dans son naïf provincialisme, qu’on pût penser qu’aucune conquête ne lui échappait. Avec toute sa logique il avait l’âme tendre et sensible et il a soupiré comme un ténorino ; il fut subjugué par quelques grandes passions dans lesquelles il n’a parfois trouvé qu’une promesse de plaisir, nullement une réalisation. Il est resté fidèle à des souvenirs, fidèle au sens exact du mot ; il ne croyait pas qu’il n’est pire souffrance que de se rappeler les jours heureux dans la misère ; et d’une aventure à l’autre il a souvent vécu de longs mois, cherchant et trouvant une consolation dans la seule pensée du bonheur qu’il avait eu ou qu’il s’était promis.

La liste ne serait pas longue de celles qui cédèrent à ce pseudo Don Juan ; à part deux ou trois professionnelles, si je puis dire, on n’y verrait que des femmes du meilleur monde, ce qui du reste faisait l’émerveillement de ce brave Romain Colomb.

Beyle fut donc souvent amoureux transi, c’en est fait de la légende qui nous le montre en un perpétuel embarquement pour Cythère.