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embrasserai vraiment ? Sera-ce demain, après, ou après ? Cela me fera autant de plaisir qu’à vous. Car votre absence a bien été aussi longue pour moi que la mienne pour vous. »

Et dans l’allégresse du retour immédiat, il risque une boutade, lui qui, depuis des mois, n’a jamais plaisanté son chagrin : « Tenez, la première fois que nous nous séparerons, prenons le parti de ne plus nous aimer. »

Ah ! certes, ils ne se sont pas arrêtés au parti de ne plus s’aimer à la prochaine séparation… Tant que dureront les séjours à Isle, pendant plus de dix ans, Diderot jettera de la même voix les mêmes appels vers Sophie ; il clamera toujours aussi haut son chagrin du départ, son allégresse du retour et, dans l’intervalle, la ferveur de son amour. Non, cette ferveur ne fléchit pas. Pendant plus de dix ans, ce sont les mêmes serments, les mêmes actions de grâces. À cause de son ardeur universelle, de sa fougue généreuse, on l’a souvent comparé à une force de la